Statistique appliquée aux énergies renouvelables

Le domaine des énergies renouvelables, où les ressources sont très aléatoires et intermittentes, est un champ d’application intéressant pour la théorie des probabilités et les méthodes statistiques. Nous illustrons ce propos par quelques exemples.

 

La demande croissante en énergie et la prise de conscience écologique a donné plus d’importance aux énergies dites renouvelables : énergie d’origine solaire, éolienne, hydraulique, thermique ou végétale.

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La part de ces énergies dans le parc énergétique reste cependant en deçà des objectifs annoncés pour plusieurs raisons : choix politiques, rentabilité, difficultés technologiques, mais surtout caractère hautement aléatoire et intermittent des ressources, que nous illustrons dans la section suivante.

Ressources et énergies aléatoires et intermittentes

Pour un lieu et un jour donnés, le rayonnement solaire sous ciel clair ou rayonnement extra-terrestre (extraterrestrial solar radiation), suit une courbe connue (Fig. 1 1ère colonne, 2ème colonne en rouge). Ce rayonnement est rendu très aléatoire par le passage des nuages, les conditions météorologiques et la réflexion du rayonnement des objets environnants, c’est le rayonnement solaire global (Fig. 1 1ère colonne, 2ème colonne en bleu). L’indice de clarté (clearness index) est le quotient du rayonnement global par le rayonnement extra-terrestre (Fig. 1 b1, b2).

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Fig. 1 : Indice de clarté et histogramme de ses valeurs pour deux journées.

Si nous appelons séquence une suite d’observations entre deux instants, nous pouvons observer (Fig. 1) le caractère intermittent des séquences : chutes et pics se succèdent. L’énergie induite par une séquence, qui est l’intégrale de la séquence, est donc elle aussi aléatoire et intermittente. Concernant l’énergie éolienne, chacun a eu l’occasion d’observer que la direction du vent et son module sont aléatoires et intermittents. Il en est de même pour l’énergie hydrolienne.

La maîtrise des énergies renouvelables nécessite donc l’utilisation des techniques de probabilités et de statistiques que nous présentons dans deux thèmes : la classification et l’ajustement de modèles.

Classification de séquences

Regrouper en un nombre fini de classes homogènes, des séquences observées pendant un même intervalle de temps, permet d’établir des séquences types (Fig. 2) et permet aussi de faciliter la modélisation et la prédiction sur cet intervalle pour les séquences d’une même classe. Cela est d’autant plus intéressant que l’on ne change pas de classe pendant plusieurs journées consécutives.

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Fig. 2 : Séquence type de deux classes après une classification des histogrammes.

Certaines méthodes de classification utilisent une notion de distance entre séquences, distance qu’on est amené à choisir, d’autres partent d’une analyse en composantes principales des séquences, enfin on peut aussi ne s’intéresser qu’aux valeurs prises par les séquences et classifier leurs histogrammes par une estimation de mélanges de lois de Dirichlet. La convergence de la classification, quand le nombre de tranches de l’histogramme augmente, se démontre à l’aide du théorème des martingales et d’un théorème sur les processus de Dirichlet.

Ajustement de modèles

  • Intérêts de la modélisationDécrire les courbes observées à l’aide de modèles probabilistes est une tâche très délicate mais elle présente plusieurs intérêts comme évidemment la prédiction de l’énergie dont on pourrait disposer entre deux instants. Un deuxième intérêt, moins connu, est qu’un modèle adéquat améliore considérablement la conception des convertisseurs (panneaux solaires, éoliennes, …). Par exemple, à partir d’un modèle probabiliste, on peut simuler par ordinateur de nombreuses séquences de vents pour régler les composantes électroniques des éoliennes grâce à un programme d’optimisation.
  • Quelques exemples de modélisation– Le processus du module du vent a été modélisé par des séries temporelles et par le mouvement brownien multifractionnaire, un processus plus irrégulier que le mouvement brownien.- L’indice de clarté de séquences courtes a été modélisé par une EDS (équation différentielle stochastique) et celui d’une séquence journalière par une EDS en milieu aléatoire, où le milieu qui représente l’aléa dû à l’environnement est modélisé par une chaîne de Markov à temps continu.- Des modèles de séries spatio-temporelles ont été utilisés pour prédire, à partir de quelques points de mesure, le rayonnement solaire au voisinage de ces points. Cela permet d’établir une cartographie du rayonnement solaire sans avoir besoin d’effectuer des mesures en tout point.

 

Texte de Richard Emilion (MAPMO, Université d’Orléans) du «Dossier Spécial Mathématiques» de Microscoop (voir l’article et les références bibliographiques associées)

 

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