Que font-les mathématiciens ? Gwendoline Blanchet a répondu à nos questions. Elle est ingénieure en traitement d’images au Centre National d’Études Spatiales à Toulouse
- D’où vient votre passion pour les mathématiques ? Et pourquoi avez-vous décidé d’étudier les mathématiques ?
Mon goût pour les mathématiques est né probablement grâce aux professeurs qui nous ont enseigné avec passion leur discipline. Les mathématiques représentent pour moi les bases nécessaires à une multitude d’applications et permettent ainsi de comprendre notre environnement. - Est-ce que vous pouvez nous parler de votre parcours scolaire/universitaire ?
Après mon bac Scientifique option « Mathématiques », j’ai intégré l’école d’ingénieur de sciences appliquées INSA à Toulouse. Par la suite, j’ai approfondi la théorie mathématique en suivant le DEA MVA (Mathématiques Vision Apprentissage) à l’ENS de Cachan puis en y réalisant ma thèse en traitement d’images. - Et après l’Université ? Est-ce que vous vouliez continuer votre carrière dans l’université ?
Au début de ma troisième année de thèse, un de mes deux directeurs de thèse m’a informée que le CNES (Centre National d’Etudes Spatiales) venait de proposer un poste d’ingénieur en traitement d’images, qui correspondait exactement à mon profil : ingénierie et mathématiques appliquées dans la thématique de ma thèse (restauration, mesure de qualité image liée à l’échantillonnage et la théorie de l’information). J’ai candidaté et j’ai été prise, ce qui m’a permis de fixer la fin de ma thèse et d’entrer dans le monde de l’entreprise. Au final, je n’ai pas essayé de faire carrière dans l’université. Dans mon poste actuel, j’ai la possibilité de donner des cours à l’université, dans les écoles d’ingénieur et pour la formation continue, ce qui me permet de garder contact avec les élèves et de travailler sur la pédagogie. - Selon vous quelles sont les raisons qui font des mathématiques le sujet le plus difficile et « détesté » parmi les autres sujets scolaires ?
Les mathématiques demandent de la rigueur et d’apprendre à raisonner dans un langage formalisé. Elles requièrent une capacité d’abstraction qui n’est pas forcément naturelle chez tous les élèves. C’est peut-être l’origine du problème ? - Pourquoi avez-vous choisi ce secteur ?
Le secteur du traitement d’images appartient au domaine des mathématiques appliquées. C’est ce côté « applicatif » qui me motive particulièrement car on peut voir les résultats des théorèmes et algorithmes sur les images. De plus le secteur de l’imagerie spatiale permet de toucher un large panel d’applications, de l’observation de la Terre à l’observation de l’Univers. - Que faites-vous actuellement (plus en détails) ?
Travaillant actuellement en tant qu’ingénieur dans le domaine de l’observation de la Terre, je développe, teste et applique des algorithmes d’évaluation de qualité d’image et de restauration des images. Mon implication intervient à différents stades d’un projet satellite : de son design en amont avec les études de qualité image en fonction des caractéristiques physiques de l’imageur, jusqu’à sa validation opérationnelle après tir. - Quelle est l’importance des mathématiques dans votre métier ?
Les mathématiques interviennent à tous les niveaux, de la modélisation de la chaîne d’acquisition d’image avec les problématiques d’échantillonnage, de compression et de filtrage, jusqu’à la restauration des images par la théorie des problèmes inverses. - Pouvez-vous décrire un projet dans lequel les mathématiques ont joué un rôle important ?
Un exemple phare est le design du satellite SPOT5 pour lequel les réflexions sur l’échantillonnage et la connaissance de la théorie de Shannon ont permis d’améliorer la résolution des images d’un facteur racine(2) sans avoir à changer le diamètre du télescope. - Est-ce que vous êtes satisfaite de «l’application» de votre connaissance des mathématiques ?
Tout à fait satisfaite. Les mathématiques apprises lors de mon cursus s’appliquent directement à mon domaine professionnel. - Changeriez-vous quelque chose dans votre vie comme mathématicienne ? Quels sont vos projets pour l’avenir ?
Je n’envisage pas de changement pour le moment car le métier est passionnant et permet l’innovation. - Que conseilleriez-vous aux mathématiciens qui veulent entrer dans le domaine industriel ?
Le monde industriel fournit de très beaux problèmes appliqués qui sollicitent les talents des mathématiciens, ce qui leur permet de passer de la théorie à la pratique et inversement. Être ouvert, partager et échanger avec les autres spécialistes, et se sentir utile, voilà une belle récompense.
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