Mathosphère – MADD Maths http://maddmaths.smai.emath.fr Mathématiques Appliquées Divulguées et Didactiques Fri, 15 Jul 2022 14:35:16 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=4.4.2 http://maddmaths.smai.math.cnrs.fr/wp-content/uploads/2016/04/cropped-logo3-32x32.jpg Mathosphère – MADD Maths http://maddmaths.smai.emath.fr 32 32 Exercice de style : Julie Digne http://maddmaths.smai.emath.fr/index.php/2017/01/13/exercice-de-style-julie-digne/ http://maddmaths.smai.emath.fr/index.php/2017/01/13/exercice-de-style-julie-digne/#respond Fri, 13 Jan 2017 15:45:04 +0000 http://maddmaths.smai.math.cnrs.fr/?p=1188 [...]]]> photo_siteJulie Digne, chercheuse au CNRS au sein du laboratoire LIRIS (équipe Géomod) dans le domaine du traitement numérique de la géométrie, a accepté notre défi. Elle explique son sujet de recherche à trois lecteurs de niveaux différents :

a. Niveau 1 : élève de 10 ans

Mon domaine de recherche consiste à concevoir des méthodes pour générer, à partir d’objets réels, des objets virtuels, c’est à dire des objets que l’on ne pourra regarder que sur un écran. Par exemple, pour des objets datant de l’époque romaine, avoir des représentations virtuelles permet de pouvoir l’observer sous toutes ses coutures et de très près sans risquer de le casser. Ces méthodes sont appelées algorithmes de reconstruction de surfaces. Il faut ensuite réussir à les optimiser, c’est à dire les rendre les plus beaux possibles. 

b. Niveau 2 : élève de 15 ans

Les modèles virtuels d’objets, de scènes et de personnages sont omniprésents : les jeux vidéo ainsi que le cinéma en font un usage intensif.

Il est difficile de soupçonner que leur création relève d’algorithmes qui se basent largement sur les mathématiques et notamment sur la géométrie.

À partir de sculptures ou d’objets réels, des appareils prennent des mesures qui sont ensuite transformés en objets virtuels.

Ces objets sont représentés sous forme de maillage, ce sont des centaines de petits triangles qui de loin donnent l’impression d’une surface lisse.

Passer de la mesure au maillage requiert de pouvoir analyser très finement les propriétés géométriques de la forme lorsqu’elle n’est connue que par l’ensemble des mesures.

c. Niveau 3 : étudiant de 20 ans (L2 science ou prépa scientifique)

La création de modèles virtuels d’objets réels passe par la numérisation de ceux-ci au moyen de scanners laser, par exemple.

Le résultat de ce processus est un ensemble de mesures qu’il convient d’analyser pour reconstruire une surface virtuelle sous forme d’un maillage.

Ceci nécessite souvent de pouvoir estimer les courbures de la surface efficacement, il faut donc des estimateurs de courbure robuste. De plus les mesures sont souvent entachées de bruit et l’on doit avoir recourt à des méthodes statistiques robustes pour extraire la forme finale de ce signal. Ce domaine de recherche est un domaine récent et en constante évolution.

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I comme Irrationnel http://maddmaths.smai.emath.fr/index.php/2017/01/05/i-comme-irrationnel/ http://maddmaths.smai.emath.fr/index.php/2017/01/05/i-comme-irrationnel/#respond Thu, 05 Jan 2017 08:17:10 +0000 http://maddmaths.smai.math.cnrs.fr/?p=1169 [...]]]> Un nombre peut-il être… «irrationnel» ? Bien sûr. Et c’est même très courant en mathématiques…

Penser qu’une discipline strictement logique et cérébrale comme les mathématiques puisse avoir donné naissance, avec une certaine satisfaction même, au concept d’irrationnel semble un véritable paradoxe.lo35_pag4

Cependant, ce n’est pas un paradoxe de type linguistique parce que le mot latin ratio, en plus de signifier raison, indique le rapport, la comparaison entre les grandeurs.

Par conséquent, les nombres rationnels sont des rapports de nombres entiers : moitié de pomme, deux tiers de gâteau, un quart de litre, etc. Et ceux qui ne sont pas rationnels en ce sens, ne peuvent qu’être appelés irrationnels.

La nécessité de cette catégorie est inhérente au problème de la mesure des longueurs ou des aires. Si je cherche une maison de cent mètres carrés, c’est-à-dire dont le sol peut être recouvert d’une centaine de tuiles carrées d’un mètre de côté, que faire si je tombe sur une maison circulaire ? Quelle est la longueur du rayon qui répond parfaitement à mes besoins ?

Il s’agit d’un problème analogue à celui de déterminer la longueur de la diagonale d’un carré de côté égal à 1 mètre, par exemple. Comme l’affirme le théorème de Pythagore, la réponse à cette question est un nombre qui multiplié par lui-même donne comme résultat le nombre 2.

Une pause de réflexion et une courte séquence d’implications logiques montrent qu’il n’existe aucun rapport de nombres entiers qui ait cette propriété !

Je peux me permettre de diviser en fractions, aussi petites que je veux, l’unité de mesure en question, mais je n’arriverai jamais, avec tout mon engagement et toute précision chirurgicale, à reproduire la longueur exacte requise.

Si ma précision est de l’ordre du centimètre, je m’apercevrai que cent quarante un centimètres sont trop peu nombreux et cent quarante deux centimètres trop nombreux ; si j’améliore ma technologie à l’ordre du millimètre, je vais trouver que mille quatre cent quatorze millimètres sont pas assez et mille quatre cent quinze sont trop, etc…

Bien que je puisse affiner ma précision, la longueur que je cherche s’échappe et s’enfuit à l’infini.

Il y a donc un écart entre le monde des nombres, en tant que rapport des entiers, et le monde des longueurs, des mesures. Écart qui jeta le trouble parmi les pythagoriciens pour lesquels tout était nombre. Accepter la présence d’entités physiques, si promptes à s’échapper de toute classification numérique rationnelle, n’a pas été une mince affaire.

La solution du problème réside dans le bon vieil adage : si vous ne pouvez pas vaincre votre ennemi, alors faites-en votre ami.

Plus précisément, avec la liberté typique de la pensée mathématique, on peut décider pacifiquement qu’il n’y a aucune raison pour laquelle on devrait appeler nombre seulement un rapport d’entiers.

Mieux vaut construire un ensemble plus large qui contient en son sein, en plus des nombres rationnels, tous les autres éléments qui correspondent à des longueurs non mesurables avec les rationnels : les nombres irrationnels, pour être précis.

Visuellement, l’ensemble des nombres rationnels peut être considéré comme une séquence de points très dense ; d’ailleurs il est possible de réaliser des nombres rationnels arbitrairement petits : un, un dixième, un centième, un millième…

L’existence de longueurs non-rationnelles indique que l’ensemble des rationnels, bien que déployé partout de manière obsessionnellement dense, est encore plus criblé de trous qu’un fromage suisse. Chaque trou correspond à un nombre irrationnel et la solution consiste à boucher tous ces trous en les déclarant, à partir de maintenant, eux-mêmes nombres : racine de deux, le nombre d’or, Pi…

Eh oui, même Pi est un nombre irrationnel, tout comme la racine de deux, il provient d’un problème de mesure : l’aire d’un cercle de rayon de longueur 1 est justement égale à Pi.

Alors… trois quatorze ? Absolument pas ! Trois quatorze est le nombre rationnel 157/50. Pi est égal à Pi, c’est tout.

Dans un certain sens, Pi est un nombre encore plus bizarre que racine de 2. Son étrangeté est codée en disant que c’est un nombre transcendant, à la différence de racine de 2 qui est algébrique. La distinction réside dans le fait que si ce dernier nombre vérifie la relation x^2 – 2 = 0, Pi, lui, n’est solution d’aucune équation polynômiale à coefficients entiers (ce qui peut être démontré avec une certaine dose de patience et d’expertise technique, c’est un théorème de Lindemann).

Cela n’est pas sans conséquence : par exemple, de la transcendance de Pi découle le fait que la quadrature du cercle, c’est-à-dire la construction d’un carré avec la même aire que celle d’un cercle à la règle et au compas, est impossible.

Ces distinctions et détails piquent peut-être votre curiosité (nombres irrationnels, nombres transcendants, constructions avec règle et compas…) mais, dans la pratique, comment l’irrationalité influence-t-elle l’utilisation des nombres en tant qu’outils de mesure du monde qui nous entoure ?

Je vais être honnête : cela change très peu, voire presque rien. En fait, dans toutes les activités humaines, on travaille toujours avec un certain seuil minimal d’erreur, qui peut changer en fonction des goûts et des problèmes : un mètre, un millimètre, un micron…

C’est pour ça que nous avons tendance à dire que Pi vaut trois quatorze, en oubliant que la séquence infinie des décimales suivantes est toujours pleine de surprises. Souvent, approcher Pi par 157/50 n’est pas grave, si on s’autorise une erreur inférieure à un centième.

L’étude des nombres irrationnels est donc surtout une activité de type mathématique, indispensable essentiellement lorsqu’on veut construire un édifice logique solide sur lequel fonder des théories accompagnées de théorèmes et de preuves rigoureuses.

Bref, même si cela peut sembler bizarre, il faut admettre que le monde rationnel des mathématiques repose sur une base significative d’irrationalité !

Traduit à partir de la versione originale en italien de Corrado Mascia avec l’autorisation de l’auteur.

]]> http://maddmaths.smai.emath.fr/index.php/2017/01/05/i-comme-irrationnel/feed/ 0 ONDES GRAVITATIONNELLES http://maddmaths.smai.emath.fr/index.php/2016/09/16/ondes-gravitationnelles/ http://maddmaths.smai.emath.fr/index.php/2016/09/16/ondes-gravitationnelles/#respond Fri, 16 Sep 2016 15:40:31 +0000 http://maddmaths.smai.math.cnrs.fr/?p=1143 [...]]]> Quand l’espace-temps frémit.

Il y a un an, dans la matinée du 14 septembre 2015, vous étiez peut-être en train de boire un café ou d’envoyer un texto… Et pourtant quelque chose est parvenu sur Terre et a marqué l’histoire de la science à jamais. Pour la première fois, une onde gravitationnelle a été détectée. Bien… et alors. ET ALORS ??

FIGURE_1
FIGURE 1 Illustration des ondes gravitationnelles et leur propagation dans un système binaire de deux trous-noirs.

Pour comprendre cette découverte et son importance il faut parler de gravitation, d’espace-temps, de trous noirs, d’Einstein et remonter cent ans en arrière. En effet, au début du 20e siècle, Albert Einstein a su montrer que l’espace et le temps ne pouvaient plus être considérés comme deux entités séparées mais qu’ils étaient liés intrinsèquement à travers ce qu’on appelle l’espace-temps. Si vous videz l’univers de son contenu matériel, si vous enlevez les étoiles, les planètes, le gaz, la matière noire ou toute autre forme d’énergie, il reste l’espace-temps. C’est la scène sur laquelle se déroule l’histoire de tout ce qui est dans l’univers. Cette scène est dotée d’une géométrie que les équations de la relativité générale peuvent décrire. C’est justement cette géométrie (ou métrique) qui va dicter le déplacement des particules et de tous les corps célestes dans les trois dimensions de l’espace. Inversement, tout déplacement de matière va également modifier la géométrie de l’espace-temps. C’est cette interaction mutuelle que l’on appelle communément la gravitation. Par ailleurs, la matière courbe l’espace-temps de façon dynamique, c’est-à-dire que cette perturbation de la métrique se propage comme des ondes dans toutes les directions à la vitesse de la lumière. On parle alors d’ondes gravitationnelles (OG).

FIGURE_2
FIGURE 2 Les 2 interféromètres du LIGO aux États-Unis sont distants de plus de 3000km soit 10 millisecondes de décalage dans la réception des signaux. Ceci permet une lecture croisée des résultats et de localiser la source du signal dans le ciel.

Ainsi, quand une étoile bouge dans l’espace, elle ride l’espace-temps et propage des OG qui peuvent parcourir des milliards d’années-lumière avant de trouver la Terre sur leur passage. Ces ondes sont de très (très) faible intensité. Alors si l’on veut avoir une chance de les détecter, il faut construire des détecteurs gigantesques et cibler des sources extrêmement massives car plus l’objet qui se déplace est massif, plus l’intensité des OG sera grande. C’est la raison pour laquelle les relativistes (physiciens spécialistes de la relativité générale) s’intéressent beaucoup aux trous noirs et tentent de modéliser mathématiquement la forme et l’intensité que prendraient les OG produites par l’un des phénomènes les plus violents de l’univers : la fusion de deux trous noirs. Ces calculs font appel aux équations de la relativité générale d’Einstein que l’on tente de résoudre à l’aide de puissants ordinateurs. À cause de l’interdé-pendance de la métrique de l’espace-temps avec la matière, c’est une tâche qui est très complexe, qui nécessite beaucoup d’ingéniosité et de subtilité dans le traitement numérique des équations.

Résoudre des équations c’est une chose, mais voir une OG, la détecter, c’en est une autre ! Pendant plusieurs décennies, de nombreuses collaborations internationales de chercheurs ont travaillé sur des instruments ayant pour but de vérifier l’existence des OG. Après beaucoup d’efforts pour améliorer la sensibilité de leurs détecteurs, l’équipe du LIGO a affirmé le 14 septembre 2015 à 9 heures 50 minutes 45 secondes (Temps universel) avoir enregistré pour la première fois la forme d’onde d’un système de deux trous noirs en train de fusionner. Cette détection est d’une importance capitale pour le monde des sciences fondamentales car elle confirme avec solidité l’existence d’un phénomène qui n’était, jusqu’à présent, qu’une entité mathématique découlant naturellement des équations d’Einstein.

FIGURE 3
FIGURE 3 Comparaison entre les signaux reçus par les deux détecteurs (à Livingston et Hanford) et les prédictions théoriques de la forme d’onde.

L’idée maintenant est d’utiliser ce nouvel outil que sont les OG pour aller répondre à des questions qui nous sont inaccessibles par la physique des ondes électromagnétiques. Jusque là on avait l’image de l’univers grâce à la lumière, aujourd’hui on a en plus les « sensations » de notre univers dans ce qui le fait vibrer, sursauter ou frémir.
Grâce à cette nouvelle physique nous allons pouvoir sonder son intimité, sa petite enfance juste après le Big-bang et son développement. De même nous allons pouvoir mieux comprendre les trous noirs qui restent malgré tout des objets très peu connus, les OG pourront nous renseigner sur leur structure et sur les mécanismes d’accrétion de la matière.

Depuis cette première détection, le détecteur européen VIRGO est lui aussi entré en fonction dans la chasse aux OG et promet, en lien avec le LIGO, de nombreux résultats intéressants. Restons à l’écoute !

Dr Patxi RITTER

]]> http://maddmaths.smai.emath.fr/index.php/2016/09/16/ondes-gravitationnelles/feed/ 0 L’alphabet : H comme Théorème-H http://maddmaths.smai.emath.fr/index.php/2015/07/31/lalphabet-h-comme-theoreme-h/ http://maddmaths.smai.emath.fr/index.php/2015/07/31/lalphabet-h-comme-theoreme-h/#respond Fri, 31 Jul 2015 11:00:13 +0000 http://maddmaths.smai.math.cnrs.fr/?p=366 [...]]]> Ne stressez pas pour toujours tout ranger : ce serait inutile. Le désordre (dans l’Univers) ne peut qu’augmenter. C’est la thermodynamique qui le dit, pas moi. Si vous ne croyez pas aux physiciens, sachez que les mathématiciens le confirment avec un théorème péremptoire et inéluctable comme celui de Pythagore : le Théorème-H. Pas de souci, rien à voir avec la bombe, ici, nous sommes tous des pacifistes.

 

theoreme_HLe mérite (ou la faute) doit être attribué à Ludwig Boltzmann. À l’époque, l’autrichien était persuadé que le mouvement d’une myriade de particules, qui bougent et se heurtent dans une boîte, était pratiquement identique à celui des particules d’un gaz. Pas seulement. Si les particules sont indiscernables, suivre le mouvement spécifique de chacune de ces boules de billard microscopiques n’est pas indispensable. Il suffit de garder un œil sur la répartition totale des particules en mouvement avec chacune sa vitesse.

Papier et stylo à la main, on écrit alors un certain nombre de rapports qui décrivent comment varie au fil du temps la quantité totale de particules qui se déplacent avec une vitesse donnée vers le nord-est, de celles qui vont avec une autre vitesse vers sud-ouest, et d’autres encore.

Quantité, relations et variations. La cuisine est faite : vous vous retrouvez dans les mathématiques des équations différentielles. De Boltzmann, en l’occurrence. Les configurations macroscopiques possibles sont encore trop nombreuses et prévoir l’évolution à partir d’une situation donnée reste prohibitif.

Le point de vue statistique suggère l’introduction de quantités globales associées à chacune de ces configurations. Dans cette logique, apparaît comme par magie la fonctionnelle H, chargée d’associer à chaque arrangement possible un numéro spécifique. Au passage du temps, en changeant la configuration, la valeur H change également. Eh bien, le Théorème H indique que la valeur de la fonctionnelle ne peut que diminuer. Juste ça. Pas frappant à première vue. Mais si nous interprétons H comme l’opposé de l’entropie, nous obtenons une preuve rigoureuse de la croissance de l’entropie au passage du temps. Puissance de la mécanique statistique.

Si vous n’êtes pas tellement convaincu de ce lien direct entre H et l’entropie, ou si vous n’avez pas vraiment compris en quoi consiste finalement cette entropie, pas grave. Les conséquences du Théorème-H se voient quand même : la décroissance indique la présence d’une direction dans le passage du temps. La bien connue flèche du temps. Toute encodée dans le signe d’une simple dérivée première. Pas mal.

Une voix discordante se charge de rappeler que les théorèmes ne sont pas des vérités absolues. Même le théorème de Pythagore, avec tout le respect dû à Euclide, est faux en géométrie sphérique. Tous les résultats mathématiques ont leur domaine de validité défini par les fondements de toute la construction. Le Théorème-H n’échappe pas non plus à cette règle. Dans le cas d’équations de Boltzmann, il y a un choix spécifique au type d’interaction entre les microscopiques boules de billard. On l’appelle l’hypothèse du chaos moléculaire et cela consiste à supposer l’absence de corrélation entre les vitesses des particules qui entrent en collision.

Comme tous les énoncés qualitatifs, le Théorème-H a aussi ses répercussions en dehors du domaine de la mécanique statistique et la dynamique des gaz. La plus jeune soeur de la fonctionnelle H, née sous l’égide de Claude Shannon, est à la base de la théorie de l’information. La fonctionnelle H de Shannon, version discrète de la H de Boltzmann, mesure, à sa manière, l’incertitude et la compressibilité d’une séquence de données et, en tant que telle, est considérée comme une plausible définition d’entropie de l’information.

Il reste la curiosité littérale pour le choix du symbole H. Il ne s’agit pas d’une aspiration entropique, mais de la majuscule de la lettre grecque “eta”. À la rigueur, donc, on devrait parler de Théorème Eta. Alors ces lignes trouveraient leur habitat naturel dans la version grecque de MADDMaths (s’il y en avait une).

Traduit à partir de la version originale en italien de Corrado Mascia avec l’autorisation de l’auteur.

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L’alphabet : G comme Gradient http://maddmaths.smai.emath.fr/index.php/2015/03/21/lalphabet-g-comme-gradient/ http://maddmaths.smai.emath.fr/index.php/2015/03/21/lalphabet-g-comme-gradient/#respond Sat, 21 Mar 2015 11:00:59 +0000 http://maddmaths.smai.math.cnrs.fr/?p=363 [...]]]> Tout phénomène naturel a lieu à cause de la présence d’un gradient. Un gradient topographique (avec de la pluie) génère une rivière et un gradient d’énergie élastique, accumulée petit à petit à l’intérieur de la croûte terrestre, est responsable d’un tremblement de terre. Quand nous faisons les courses au rayon de fruits et légumes du supermarché, nous gelons : c’est la faute du gradient de température. Quand nous en sortons, nous avons l’impression de crever de chaud. Encore la faute au gradient, seul responsable de cette variation thermique.

 

gradientIl y a plusieurs façons de mesurer le changement des choses et, concernant le gradient, la question est relative. Le choc thermique que nous subissons en faisant les courses est dû au fait que hors du supermarché il y a trente degrés à l’ombre et, passé la porte, la température passe rapidement a quinze degrés. Un saut de quinze degrés en quelques mètres. Changement, oui, mais rapide. Ou encore plus précisément, changement raide. Ce que nous mesurons, ce n’est pas la différence absolue entre deux valeurs, mais la différence relativement à la longueur de la distance parcourue en cette transition. Il s’agit d’un rapport entre dimensions : saut de température divisé par la distance parcourue.

Qui y voit une similitude avec le concept de dérivée est sur la bonne route : le gradient est, pratiquement, une dérivée. Mais avec une différence : tandis que la dérivée détermine la pente d’une courbe et nous restreint à un parcours unidimensionnel, le gradient a la liberté d’un déplacement bien plus grand.

Revenons à l’exemple de la température. Imaginons une pièce et, pour simplifier, arrêtons l’avancement du temps. À chaque point de la pièce on peut y associer sa valeur de température. Près des chauffages (allumés si on est en hiver) la température est élevée, près des fenêtres (ouvertes… même en hiver !) elle est basse. En considérant un point de départ dans la pièce, nous pouvons déterminer plusieurs directions de déplacement (en haut, en bas, à droite, à gauche, en diagonale, transversalement, …) et pour chacune d’entre elles il est possible de déterminer le rapport correspondant entre la variation de température et la distance parcourue. Ainsi et en passant à la limite dans les longueurs des distances au dénominateur, à chaque point de la pièce est associé un objet mystérieux qui codifie la rapidité des changements thermiques selon la direction de déplacement.

En mathématiques l’objet mystérieux a un nom précis, il s’appelle « différentielle », et il vit dans le monde de l’Algèbre Linéaire. Pour un miracle du monde qui nous entoure, il est possible de décrire cette fantomatique différentielle par une quantité plus facile à manipuler : le gradient. Dans l’exemple précédent, en chaque point (de la pièce), le gradient (de température) est identifié à un vecteur dont la direction correspond à celle de variation maximale, et la longueur décrit la rapidité de variation (de température). Notre pièce est ainsi peuplée de vecteurs qui, point par point, indiquent selon quelle direction nous devons nous déplacer si nous cherchons un endroit plus chaud.

nablaUne fois l’objet défini – dont le symbole est un triangle isocèle à tête en bas, appelé « nabla » à cause d’une ressemblance avec un type d’harpe de la Grèce antique – et le concept formalisé, l’amusement est garanti. Laissant à nouveau le temps s’écouler, et faisant confiance à Jean-Baptiste Fourier, nous pouvons supposer que la chaleur se déplace dans la pièce selon la direction opposée à celle indiquée par le gradient, donc dans la direction de variation maximale de température et du chaud vers le froid. Utilisant papier et stylo pour compléter le bilan de quantités en jeu, nous retrouvons la célèbre « équation de la chaleur » qui décrit l’évolution des conditions thermiques de la pièce à partir de maintenant jusqu’à la fin des jours.

De la même façon, de nombreux autres modèles existent dans lesquels les variations temporelles d’une quantité observée sont guidées par un gradient. Avec un seul mot et un seul instrument nous pouvons jouer des musiques apparemment différentes : le déplacement de charges électriques (loi d’Ohm), l’hydraulique et la construction des fontaines de Dijon (loi de Darcy), le transport de masse (loi de Fick), etc. Les contextes, les problèmes et les significations physiques changent, mais au bout du compte il s’agit toujours de la mélodie du gradient.

 

Traduit à partir de la version originale en italien de Corrado Mascia avec l’autorisation de l’auteur.

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L’alphabet : F comme Fractale http://maddmaths.smai.emath.fr/index.php/2014/11/22/lalphabet-f-comme-fractale/ http://maddmaths.smai.emath.fr/index.php/2014/11/22/lalphabet-f-comme-fractale/#respond Sat, 22 Nov 2014 11:00:52 +0000 http://maddmaths.smai.math.cnrs.fr/?p=360 [...]]]> Nous avons tous dans notre jeunesse été amenés à colorier un motif avec un crayon de couleur bien taillé en traçant des lignes brisées continues. Nous sommes-nous donc interrogés sur le fait que notre motif pouvait être colorié complètement à l’aide d’une ligne brisée infinie ?

floconUne figure fractale, terme introduit par Benoît Mandelbrot en 1974, est une courbe ou une surface de forme irrégulière. Chaque fractale possède un motif élémentaire qui se répète une infinité de fois à différentes échelles, ce que l’on nomme principe d’auto-similarité. Ainsi, en observant une fractale avec des loupes de plus en plus grossissantes, on observerait des motifs dont les formes seraient similaires. Par exemple le Flocon de Von Koch ci-dessus.

Fruit de l’imagination des mathématiciens, ces objets peuvent aussi se rencontrer dans la nature, par exemple : choux, feuilles de fougères, cratères de la lune, …

fougereLes mathématiciens ont également trouvé des propriétés spécifiques dues à la forme très irrégulière d’objets fractals. Par exemple les murs anti-bruits, les antennes des téléphones portables, les animations numériques des films et jeux vidéo, la création d’objets d’art, … Pour vous convaincre encore plus que les objets fractals sont présents dans votre quotidien et aussi dans l’imaginaire artistique, nous vous proposons de visionner le film : À la recherche de la dimension cachée.

 

Pour aller plus loin, vous pouvez aller voir les chapitres 5 et 6 du film Dimensions.

 

Texte de Philippe GRILLOT (Université d’Orléans).

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L’alphabet : E comme exponentielle http://maddmaths.smai.emath.fr/index.php/2014/06/24/lalphabet-e-comme-exponentielle/ http://maddmaths.smai.emath.fr/index.php/2014/06/24/lalphabet-e-comme-exponentielle/#respond Tue, 24 Jun 2014 11:00:47 +0000 http://maddmaths.smai.math.cnrs.fr/?p=354 [...]]]> Des élevages de lapins… aux comptes bancaires : l’exponentielle ne concerne pas seulement les célèbres « croissances », mais elle nous réserve bien d’autres applications et d’autres surprises…

expGénéralement l’exponentielle (et sa réciproque : le logarithme) est considérée comme un objet « difficile », à éviter si possible. Sauf quand on parle de « croissance exponentielle ». Partons de ce point.

Imaginons que l’on veuille contrôler la croissance d’une population, par exemple, de lapins. Nous voulons savoir, année par année (ou mois par mois), combien de lapins nous avons, mais ce qui nous intéresse le plus est de savoir la variation du nombre de lapins d’une année à la suivante (donc la différence du nombre de lapins entre 2009 et 2010, par exemple).

Un modèle prédictif qui nous donne combien de lapins nous avons doit indiquer combien vaut cette augmentation. Un premier modèle très simple pourrait, par exemple, affirmer que la variation est constante : chaque année nous produisons 10 lapins de plus. La croissance, alors, sera facilement calculable : 10 lapins par année, donc la deuxième année nous aurons 10 lapins de plus que ceux que nous avions initialement, la troisième année 20 lapins de plus, et ainsi de suite. La croissance est donc linéaire (sur un graphe année/nombre de lapins) et le graphique qui représente cette situation est une droite.

Néanmoins, ce modèle n’est pas si convaincant, parce qu’en réalité plus il y a de lapins, plus il en naît. Donc si 10 est le nombre de lapins produits par un couple de lapins chaque année, chaque année nous aurons une augmentation de 10 lapins multiplié par le nombre de couples. Ainsi, plus nous avons de couples, plus notre production annuelle augmente ! Le cadre déterminé par ce nouveau modèle est justement celui d’une croissance exponentielle, donc quelque chose du type 10 puissance n : 10 fois 10 fois 10 fois 10…, et ceci, autant de fois qu’il y a d’années passées.

Nous trouvons le même type de mécanisme pour les comptes bancaires. Tous les ans la banque donne un « bonus », lié au fait que nous y avons déposé notre argent, et qui est proportionnel au dépôt. Ce qui est indiqué n’est pas la variation absolue du compte en un an, mais le « taux d’intérêt », c’est à dire le rapport entre la variation absolue et la valeur du dépôt. Ce système correspond exactement au modèle de croissance exponentielle de lapins. On se demande donc pourquoi nous ne voyons pas une énorme augmentation de notre compte bancaire… La réponse peut s’obtenir en raisonnant comme pour les lapins : 1 fois 1 fois 1 fois 1… et ce, autant de fois qu’il y a d’années passées, donne toujours 1. Donc à la fin, nous obtenons toujours le dépôt initial ! En réalité, dans le calcul il faut remplacer 1 par un nombre légèrement plus grand, mais essentiellement ceci ne change pas grand chose (la croissance n’est pas aussi rapide que nous le voudrions !)…

En mathématiques, pour des raisons trop longues à expliquer en quelques mots, on s’intéresse particulièrement à l’exponentielle qui a pour base le nombre de Néper, qui est noté « e ». Il nous intéresse, par exemple, de savoir combien vaut e fois e fois e fois e… Il s’agit d’un nombre qui intervient dans plusieurs situations et qui donc a une forte popularité dans la communauté. Le nombre e, comme π (pi grec), est un nombre irrationnel, c’est-à-dire que ses décimales n’ont aucune forme de périodicité.

Ce qu’une exponentielle fait, le logarithme le défait

Parlons, pour conclure, d’un autre point douloureux : le logarithme. D’où sort-il ? Si nous savons additionner, très vite nous aurons aussi envie de soustraire. Et si nous savons multiplier, de diviser. La soustraction et la division sont les opérations réciproques de l’addition et de la multiplication. En pratique, si additionner et multiplier nous donnent une certaine valeur, pour revenir aux valeurs initiales il faut soustraire et diviser. De la même façon, le logarithme est l’opération réciproque de l’exponentielle, et donc pour résoudre des problèmes avec des exponentielles son utilisation est indispensable. Ce qu’une exponentielle fait, le logarithme le défait. Pratique, non ?

 

Traduit à partir de la version originale en italien de Corrado Mascia avec l’autorisation de l’auteur.

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L’alphabet : D comme Distance http://maddmaths.smai.emath.fr/index.php/2014/02/20/d-comme-distance/ http://maddmaths.smai.emath.fr/index.php/2014/02/20/d-comme-distance/#respond Thu, 20 Feb 2014 11:00:58 +0000 http://maddmaths.smai.math.cnrs.fr/?p=348 [...]]]> Beaucoup de concepts mathématiques ne sont en réalité que le résultat de la formalisation, ou la clarification d’« objets » concrets ; par exemple, la notion de « distance ».

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« Quelle est la distance de chez moi au travail », « combien de temps faut-il pour se rendre à tel endroit », … sont toutes des pensées qui communément, spontanément, viennent dans nos esprits.

Il y a plusieurs « types » de distances. Une distance à vol d’oiseau, par exemple, est différente de celle qu’on trouve en parcourant une route. En plus des distances physiques, il y a les distances temporelles et même là, la situation peut être de nature différente : combien de temps cela va-t-il prendre ? Vais-je y aller à pied, en voiture, en vélo, en bus ?

Chaque distance est relative à un problème, à une situation différente. C’est une caractéristique des mathématiques : découvrir que certaines quantités, que l’on introduit dans des contextes différents, en réalité sont des exemples d’un même concept abstrait. C’est de là qu’on déduit une définition, c’est-à-dire qu’on arrive à définir précisément le sens d’un certain mot.

On baptise alors « distance » un objet qui possède certaines propriétés, afin de rendre clair et non ambigu pour tous ce concept. Il s’agit de déterminer un vocabulaire commun pour tous les mathématiciens.

une propriété de minimisation

La propriété la plus importante de la distance est une propriété de « minimisation ». L’idée est que la distance est toujours celle qui correspond à la valeur minimale par rapport à de nombreuses stratégies possibles. Si, par exemple, on demande la distance entre Paris et Lyon, on se réfère à la route minimale qu’il faut parcourir ; on ne va pas chercher à passer par Bordeaux ou Rennes, on cherche l’itinéraire le plus direct. La formalisation de cette propriété de minimisation est donnée par la fameuse inégalité triangulaire : la distance de Paris à Lyon est plus petite que (ou au plus égale à) celle de Paris à une troisième localité, plus celle de cet endroit à Lyon. Passer vers un troisième endroit ne peut pas raccourcir le chemin (au mieux la longueur est la même).

En général, on considère deux autres propriétés pour une distance. L’une de ces propriétés est que des points différents se trouvent toujours à une distance strictement positive (en d’autres termes, on interdit le don d’ubiquité ou la possibilité de téléportation). L’autre est celle de symétrie : pour aller de Paris à Lyon on doit faire les mêmes kilomètres que pour aller de Lyon à Paris. Mais il y a des cas, dans la vie réelle, où la symétrie n’est pas vérifiée. Prenons le cas des rues à sens unique : parfois aller d’un endroit à un autre en voiture peut être beaucoup plus court que le voyage de retour…

Quel est l’avantage d’introduire le nom de distance ?

Enfin, on se demande : quel est l’avantage d’introduire le nom de distance ? Essentiellement, c’est de voir sous un même point de vue des problèmes différents. Objets et quantités introduits dans un cas peuvent en effet être transportés à l’autre et cela peut être extrêmement rentable. Donc on espère (et cela arrive souvent) résoudre deux problèmes pour le prix d’un. Simple question de commodité…

Traduit à partir de la version originale en italien de Corrado Mascia avec l’autorisation de l’auteur.

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Statistique appliquée aux énergies renouvelables http://maddmaths.smai.emath.fr/index.php/2014/02/20/statistique-appliquee-aux-energies-renouvelables/ http://maddmaths.smai.emath.fr/index.php/2014/02/20/statistique-appliquee-aux-energies-renouvelables/#respond Thu, 20 Feb 2014 11:00:19 +0000 http://maddmaths.smai.math.cnrs.fr/?p=230 [...]]]> Le domaine des énergies renouvelables, où les ressources sont très aléatoires et intermittentes, est un champ d’application intéressant pour la théorie des probabilités et les méthodes statistiques. Nous illustrons ce propos par quelques exemples.

 

La demande croissante en énergie et la prise de conscience écologique a donné plus d’importance aux énergies dites renouvelables : énergie d’origine solaire, éolienne, hydraulique, thermique ou végétale.

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La part de ces énergies dans le parc énergétique reste cependant en deçà des objectifs annoncés pour plusieurs raisons : choix politiques, rentabilité, difficultés technologiques, mais surtout caractère hautement aléatoire et intermittent des ressources, que nous illustrons dans la section suivante.

Ressources et énergies aléatoires et intermittentes

Pour un lieu et un jour donnés, le rayonnement solaire sous ciel clair ou rayonnement extra-terrestre (extraterrestrial solar radiation), suit une courbe connue (Fig. 1 1ère colonne, 2ème colonne en rouge). Ce rayonnement est rendu très aléatoire par le passage des nuages, les conditions météorologiques et la réflexion du rayonnement des objets environnants, c’est le rayonnement solaire global (Fig. 1 1ère colonne, 2ème colonne en bleu). L’indice de clarté (clearness index) est le quotient du rayonnement global par le rayonnement extra-terrestre (Fig. 1 b1, b2).

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Fig. 1 : Indice de clarté et histogramme de ses valeurs pour deux journées.

Si nous appelons séquence une suite d’observations entre deux instants, nous pouvons observer (Fig. 1) le caractère intermittent des séquences : chutes et pics se succèdent. L’énergie induite par une séquence, qui est l’intégrale de la séquence, est donc elle aussi aléatoire et intermittente. Concernant l’énergie éolienne, chacun a eu l’occasion d’observer que la direction du vent et son module sont aléatoires et intermittents. Il en est de même pour l’énergie hydrolienne.

La maîtrise des énergies renouvelables nécessite donc l’utilisation des techniques de probabilités et de statistiques que nous présentons dans deux thèmes : la classification et l’ajustement de modèles.

Classification de séquences

Regrouper en un nombre fini de classes homogènes, des séquences observées pendant un même intervalle de temps, permet d’établir des séquences types (Fig. 2) et permet aussi de faciliter la modélisation et la prédiction sur cet intervalle pour les séquences d’une même classe. Cela est d’autant plus intéressant que l’on ne change pas de classe pendant plusieurs journées consécutives.

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Fig. 2 : Séquence type de deux classes après une classification des histogrammes.

Certaines méthodes de classification utilisent une notion de distance entre séquences, distance qu’on est amené à choisir, d’autres partent d’une analyse en composantes principales des séquences, enfin on peut aussi ne s’intéresser qu’aux valeurs prises par les séquences et classifier leurs histogrammes par une estimation de mélanges de lois de Dirichlet. La convergence de la classification, quand le nombre de tranches de l’histogramme augmente, se démontre à l’aide du théorème des martingales et d’un théorème sur les processus de Dirichlet.

Ajustement de modèles

  • Intérêts de la modélisationDécrire les courbes observées à l’aide de modèles probabilistes est une tâche très délicate mais elle présente plusieurs intérêts comme évidemment la prédiction de l’énergie dont on pourrait disposer entre deux instants. Un deuxième intérêt, moins connu, est qu’un modèle adéquat améliore considérablement la conception des convertisseurs (panneaux solaires, éoliennes, …). Par exemple, à partir d’un modèle probabiliste, on peut simuler par ordinateur de nombreuses séquences de vents pour régler les composantes électroniques des éoliennes grâce à un programme d’optimisation.
  • Quelques exemples de modélisation– Le processus du module du vent a été modélisé par des séries temporelles et par le mouvement brownien multifractionnaire, un processus plus irrégulier que le mouvement brownien.- L’indice de clarté de séquences courtes a été modélisé par une EDS (équation différentielle stochastique) et celui d’une séquence journalière par une EDS en milieu aléatoire, où le milieu qui représente l’aléa dû à l’environnement est modélisé par une chaîne de Markov à temps continu.- Des modèles de séries spatio-temporelles ont été utilisés pour prédire, à partir de quelques points de mesure, le rayonnement solaire au voisinage de ces points. Cela permet d’établir une cartographie du rayonnement solaire sans avoir besoin d’effectuer des mesures en tout point.

 

Texte de Richard Emilion (MAPMO, Université d’Orléans) du «Dossier Spécial Mathématiques» de Microscoop (voir l’article et les références bibliographiques associées)

 

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L’alphabet : C comme Continuité http://maddmaths.smai.emath.fr/index.php/2013/11/25/alphabet-c-comme-continuite/ http://maddmaths.smai.emath.fr/index.php/2013/11/25/alphabet-c-comme-continuite/#respond Mon, 25 Nov 2013 11:00:32 +0000 http://maddmaths.smai.math.cnrs.fr/?p=107 [...]]]>

Le monde dans lequel nous vivons

photo_pellicule Beaucoup d’idées en mathématiques semblent abstraites, mais elles découlent de la perception concrète que nous avons de la réalité. Par exemple, la notion de continuité découle du fait que le monde qui nous entoure, en général, change de manière relativement progressive.
Pour mieux comprendre ce concept, essayez d’imaginer qu’au contraire, le monde ne soit pas du tout continu. Je me lève le matin, je vais à la salle de bain et je fais couler de l’eau pour me laver. Tout va bien au début : l’eau coule du robinet à la température que j’aime le plus et qui me permet de passer de l’état de torpeur à celui de réveil sans traumatisme particulier. Mais, tout à coup, sans que rien ne prévienne, la température de l’eau devient froide. J’ai à peine le temps de me remettre du choc qu’elle devient bouillante. J’éloigne les mains d’un seul coup, mais le jet (qui avant descendait régulièrement vers le bas), sans aucun avertissement, commence à changer de direction : vers le haut, vers le miroir, vers moi, puis vers le bas et ainsi de suite, sans aucune raison apparente. Après, c’est au tour du carrelage : jusqu’à hier il s’usait au fur et à mesure et soudain il casse. La serviette de la salle de bains disparaît et réapparaît dans le salon. À sa place apparaît une nappe. Et ainsi de suite. Tout semble comme fracturé, comme dans un cadre futuriste, dans lequel l’image serait morcelée. Il s’agit clairement d’une mauvaise journée…
Qu’est-ce donc, la continuité ? C’est le contraire de ce que j’ai décrit. C’est un monde dans lequel deux photos, prises à des instants infiniment proches, sont infiniment ressemblantes. Les transitions et les transformations peuvent se produire, mais pas de manière drastique et immédiate. Les changements peuvent se produire, mais toujours à travers une séquence d’états intermédiaires de l’état de départ à celui d’arrivée. De toute évidence, le concept doit être précisé et c’est à ce stade que l’utilisation du langage mathématique montre toute sa puissance et sa flexibilité.

Ici, je voudrais insister sur deux ingrédients fondamentaux. Le premier concerne la «ressemblance des photos». Pour parler de continuité, on doit introduire un concept de «proximité» qui, en général, dépend du contexte. Selon le problème étudié, deux objets peuvent sembler très similaires ou très différents. Le second aspect à préciser est celui d’«instants voisins». Ici aussi, on doit donner un sens à la notion de «proximité» des instants. La continuité est une propriété qui relie la similitude des photos à la proximité des instants. Tout, cependant, peut être spécifié en utilisant le formalisme mathématique de manière très élégante et générale.

De ce qui précède, on en déduit un fait important : «être continu» n’est pas une propriété absolue ! Selon les «lunettes» avec laquelle nous regardons un phénomène, il peut être continu ou non. Souvent, c’est le problème même qui suggère la manière dont il doit être regardé et souvent cette manière se traduit en une propriété de continuité. Une bonne compréhension des concepts naturels de «proximité» permet souvent une compréhension profonde du problème même.
Traduit à partir de la version originale en italien de Corrado Mascia avec l’autorisation de l’auteur.

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