Mathématiques pour tous – MADD Maths http://maddmaths.smai.emath.fr Mathématiques Appliquées Divulguées et Didactiques Fri, 15 Jul 2022 14:35:16 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=4.4.2 http://maddmaths.smai.math.cnrs.fr/wp-content/uploads/2016/04/cropped-logo3-32x32.jpg Mathématiques pour tous – MADD Maths http://maddmaths.smai.emath.fr 32 32 ONDES GRAVITATIONNELLES http://maddmaths.smai.emath.fr/index.php/2016/09/16/ondes-gravitationnelles/ http://maddmaths.smai.emath.fr/index.php/2016/09/16/ondes-gravitationnelles/#respond Fri, 16 Sep 2016 15:40:31 +0000 http://maddmaths.smai.math.cnrs.fr/?p=1143 [...]]]> Quand l’espace-temps frémit.

Il y a un an, dans la matinée du 14 septembre 2015, vous étiez peut-être en train de boire un café ou d’envoyer un texto… Et pourtant quelque chose est parvenu sur Terre et a marqué l’histoire de la science à jamais. Pour la première fois, une onde gravitationnelle a été détectée. Bien… et alors. ET ALORS ??

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FIGURE 1 Illustration des ondes gravitationnelles et leur propagation dans un système binaire de deux trous-noirs.

Pour comprendre cette découverte et son importance il faut parler de gravitation, d’espace-temps, de trous noirs, d’Einstein et remonter cent ans en arrière. En effet, au début du 20e siècle, Albert Einstein a su montrer que l’espace et le temps ne pouvaient plus être considérés comme deux entités séparées mais qu’ils étaient liés intrinsèquement à travers ce qu’on appelle l’espace-temps. Si vous videz l’univers de son contenu matériel, si vous enlevez les étoiles, les planètes, le gaz, la matière noire ou toute autre forme d’énergie, il reste l’espace-temps. C’est la scène sur laquelle se déroule l’histoire de tout ce qui est dans l’univers. Cette scène est dotée d’une géométrie que les équations de la relativité générale peuvent décrire. C’est justement cette géométrie (ou métrique) qui va dicter le déplacement des particules et de tous les corps célestes dans les trois dimensions de l’espace. Inversement, tout déplacement de matière va également modifier la géométrie de l’espace-temps. C’est cette interaction mutuelle que l’on appelle communément la gravitation. Par ailleurs, la matière courbe l’espace-temps de façon dynamique, c’est-à-dire que cette perturbation de la métrique se propage comme des ondes dans toutes les directions à la vitesse de la lumière. On parle alors d’ondes gravitationnelles (OG).

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FIGURE 2 Les 2 interféromètres du LIGO aux États-Unis sont distants de plus de 3000km soit 10 millisecondes de décalage dans la réception des signaux. Ceci permet une lecture croisée des résultats et de localiser la source du signal dans le ciel.

Ainsi, quand une étoile bouge dans l’espace, elle ride l’espace-temps et propage des OG qui peuvent parcourir des milliards d’années-lumière avant de trouver la Terre sur leur passage. Ces ondes sont de très (très) faible intensité. Alors si l’on veut avoir une chance de les détecter, il faut construire des détecteurs gigantesques et cibler des sources extrêmement massives car plus l’objet qui se déplace est massif, plus l’intensité des OG sera grande. C’est la raison pour laquelle les relativistes (physiciens spécialistes de la relativité générale) s’intéressent beaucoup aux trous noirs et tentent de modéliser mathématiquement la forme et l’intensité que prendraient les OG produites par l’un des phénomènes les plus violents de l’univers : la fusion de deux trous noirs. Ces calculs font appel aux équations de la relativité générale d’Einstein que l’on tente de résoudre à l’aide de puissants ordinateurs. À cause de l’interdé-pendance de la métrique de l’espace-temps avec la matière, c’est une tâche qui est très complexe, qui nécessite beaucoup d’ingéniosité et de subtilité dans le traitement numérique des équations.

Résoudre des équations c’est une chose, mais voir une OG, la détecter, c’en est une autre ! Pendant plusieurs décennies, de nombreuses collaborations internationales de chercheurs ont travaillé sur des instruments ayant pour but de vérifier l’existence des OG. Après beaucoup d’efforts pour améliorer la sensibilité de leurs détecteurs, l’équipe du LIGO a affirmé le 14 septembre 2015 à 9 heures 50 minutes 45 secondes (Temps universel) avoir enregistré pour la première fois la forme d’onde d’un système de deux trous noirs en train de fusionner. Cette détection est d’une importance capitale pour le monde des sciences fondamentales car elle confirme avec solidité l’existence d’un phénomène qui n’était, jusqu’à présent, qu’une entité mathématique découlant naturellement des équations d’Einstein.

FIGURE 3
FIGURE 3 Comparaison entre les signaux reçus par les deux détecteurs (à Livingston et Hanford) et les prédictions théoriques de la forme d’onde.

L’idée maintenant est d’utiliser ce nouvel outil que sont les OG pour aller répondre à des questions qui nous sont inaccessibles par la physique des ondes électromagnétiques. Jusque là on avait l’image de l’univers grâce à la lumière, aujourd’hui on a en plus les « sensations » de notre univers dans ce qui le fait vibrer, sursauter ou frémir.
Grâce à cette nouvelle physique nous allons pouvoir sonder son intimité, sa petite enfance juste après le Big-bang et son développement. De même nous allons pouvoir mieux comprendre les trous noirs qui restent malgré tout des objets très peu connus, les OG pourront nous renseigner sur leur structure et sur les mécanismes d’accrétion de la matière.

Depuis cette première détection, le détecteur européen VIRGO est lui aussi entré en fonction dans la chasse aux OG et promet, en lien avec le LIGO, de nombreux résultats intéressants. Restons à l’écoute !

Dr Patxi RITTER

]]> http://maddmaths.smai.emath.fr/index.php/2016/09/16/ondes-gravitationnelles/feed/ 0 Statistique appliquée aux énergies renouvelables http://maddmaths.smai.emath.fr/index.php/2014/02/20/statistique-appliquee-aux-energies-renouvelables/ http://maddmaths.smai.emath.fr/index.php/2014/02/20/statistique-appliquee-aux-energies-renouvelables/#respond Thu, 20 Feb 2014 11:00:19 +0000 http://maddmaths.smai.math.cnrs.fr/?p=230 [...]]]> Le domaine des énergies renouvelables, où les ressources sont très aléatoires et intermittentes, est un champ d’application intéressant pour la théorie des probabilités et les méthodes statistiques. Nous illustrons ce propos par quelques exemples.

 

La demande croissante en énergie et la prise de conscience écologique a donné plus d’importance aux énergies dites renouvelables : énergie d’origine solaire, éolienne, hydraulique, thermique ou végétale.

energies

La part de ces énergies dans le parc énergétique reste cependant en deçà des objectifs annoncés pour plusieurs raisons : choix politiques, rentabilité, difficultés technologiques, mais surtout caractère hautement aléatoire et intermittent des ressources, que nous illustrons dans la section suivante.

Ressources et énergies aléatoires et intermittentes

Pour un lieu et un jour donnés, le rayonnement solaire sous ciel clair ou rayonnement extra-terrestre (extraterrestrial solar radiation), suit une courbe connue (Fig. 1 1ère colonne, 2ème colonne en rouge). Ce rayonnement est rendu très aléatoire par le passage des nuages, les conditions météorologiques et la réflexion du rayonnement des objets environnants, c’est le rayonnement solaire global (Fig. 1 1ère colonne, 2ème colonne en bleu). L’indice de clarté (clearness index) est le quotient du rayonnement global par le rayonnement extra-terrestre (Fig. 1 b1, b2).

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Fig. 1 : Indice de clarté et histogramme de ses valeurs pour deux journées.

Si nous appelons séquence une suite d’observations entre deux instants, nous pouvons observer (Fig. 1) le caractère intermittent des séquences : chutes et pics se succèdent. L’énergie induite par une séquence, qui est l’intégrale de la séquence, est donc elle aussi aléatoire et intermittente. Concernant l’énergie éolienne, chacun a eu l’occasion d’observer que la direction du vent et son module sont aléatoires et intermittents. Il en est de même pour l’énergie hydrolienne.

La maîtrise des énergies renouvelables nécessite donc l’utilisation des techniques de probabilités et de statistiques que nous présentons dans deux thèmes : la classification et l’ajustement de modèles.

Classification de séquences

Regrouper en un nombre fini de classes homogènes, des séquences observées pendant un même intervalle de temps, permet d’établir des séquences types (Fig. 2) et permet aussi de faciliter la modélisation et la prédiction sur cet intervalle pour les séquences d’une même classe. Cela est d’autant plus intéressant que l’on ne change pas de classe pendant plusieurs journées consécutives.

histo2

Fig. 2 : Séquence type de deux classes après une classification des histogrammes.

Certaines méthodes de classification utilisent une notion de distance entre séquences, distance qu’on est amené à choisir, d’autres partent d’une analyse en composantes principales des séquences, enfin on peut aussi ne s’intéresser qu’aux valeurs prises par les séquences et classifier leurs histogrammes par une estimation de mélanges de lois de Dirichlet. La convergence de la classification, quand le nombre de tranches de l’histogramme augmente, se démontre à l’aide du théorème des martingales et d’un théorème sur les processus de Dirichlet.

Ajustement de modèles

  • Intérêts de la modélisationDécrire les courbes observées à l’aide de modèles probabilistes est une tâche très délicate mais elle présente plusieurs intérêts comme évidemment la prédiction de l’énergie dont on pourrait disposer entre deux instants. Un deuxième intérêt, moins connu, est qu’un modèle adéquat améliore considérablement la conception des convertisseurs (panneaux solaires, éoliennes, …). Par exemple, à partir d’un modèle probabiliste, on peut simuler par ordinateur de nombreuses séquences de vents pour régler les composantes électroniques des éoliennes grâce à un programme d’optimisation.
  • Quelques exemples de modélisation– Le processus du module du vent a été modélisé par des séries temporelles et par le mouvement brownien multifractionnaire, un processus plus irrégulier que le mouvement brownien.- L’indice de clarté de séquences courtes a été modélisé par une EDS (équation différentielle stochastique) et celui d’une séquence journalière par une EDS en milieu aléatoire, où le milieu qui représente l’aléa dû à l’environnement est modélisé par une chaîne de Markov à temps continu.- Des modèles de séries spatio-temporelles ont été utilisés pour prédire, à partir de quelques points de mesure, le rayonnement solaire au voisinage de ces points. Cela permet d’établir une cartographie du rayonnement solaire sans avoir besoin d’effectuer des mesures en tout point.

 

Texte de Richard Emilion (MAPMO, Université d’Orléans) du «Dossier Spécial Mathématiques» de Microscoop (voir l’article et les références bibliographiques associées)

 

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Quand les mathématiques traquent les tourbillons océaniques http://maddmaths.smai.emath.fr/index.php/2013/05/23/quand-les-mathematiques-traquent-les-tourbillons-oceaniques/ http://maddmaths.smai.emath.fr/index.php/2013/05/23/quand-les-mathematiques-traquent-les-tourbillons-oceaniques/#respond Thu, 23 May 2013 11:00:47 +0000 http://maddmaths.smai.math.cnrs.fr/?p=180 [...]]]> 2013 est l’année des mathématiques de la planète Terre : c’est l’occasion de proposer aux mathématiciens de nouveaux défis liés aux géosciences. En voici un exemple tiré de communications de Laure Saint-Raymond.

 

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La circulation des courants marins vue par satellite. NASA/Goddard Space Flight Center

La circulation océanique joue un rôle fondamental pour la vie marine et certaines activités humaines comme la navigation et la pêche. Pour décrire la façon dont les masses d’eau des océans se déplacent, il faut prendre en compte de multiples facteurs comme la rotation de la Terre, les courants à très grande échelle, ainsi que les petites fluctuations provoquées par le vent. Parmi les phénomènes remarquables, certains tourbillons (aussi appelés vortex océaniques) s’étendent sur plusieurs dizaines de kilomètres et peuvent abriter des écosystèmes particulièrement intéressants. Comprendre qualitativement l’existence de ces tourbillons est un défi pour les mathématiciens.

 Comprendre l’existence des tourbillons, un défi pour les mathématiciens

En négligeant les effets dus aux variations de densité, de température et de salinité de l’eau, ainsi que les variations verticales de la circulation (la profondeur des océans étant très faible comparée à leur étendue horizontale), les seules inconnues du problème sont la vitesse locale (une quantité à deux dimensions) et la hauteur d’eau. Connaissant de plus les grands courants marins au niveau de la planète, on peut supposer que ces inconnues (vitesse et hauteur d’eau) sont elles-mêmes de petites fluctuations autour de leur valeurs moyennes. Leur évolution au cours du temps est alors régie par un système d’équations aux dérivées partielles relativement simple, traduisant d’une part la conservation de la quantité d’eau, et d’autre part l’accélération des masses d’eau par la pression hydrostatique, la friction avec le vent et la rotation de la Terre (force de Coriolis). Il est possible de le résoudre au moins de façon approchée, en superposant des solutions particulières, appelées ondes. Les résultats obtenus sont cependant beaucoup trop complexes, en raison du nombre important de paramètres, pour permettre une visualisation rapide de la géométrie des écoulements.

Sept problèmes à un million de dollars

L’idée est alors d’introduire un filtre, car il est inutile d’avoir une résolution très fine pour obtenir une image nette à l’échelle des tourbillons. Une difficulté majeure provient du fait que les différentes ondes créées par le vent ont des comportements très variés et ne peuvent pas être analysées par le même filtre. Un travail en collaboration avec C. Cheverry (Rennes), I. Gallagher et T. Paul (Paris) a permis d’obtenir un bon outil dit de polarisation, qui permet de prédire de façon systématique la localisation des vortex. Il reste maintenant à en tester la robustesse, pour savoir s’il peut apporter une réponse satisfaisante pour des modèles plus réalistes, prenant en compte par exemple la topographie des fonds sous-marins et les mouvements verticaux en résultant, les flux liés aux différences de température, voire les interactions entre l’air et la mer.
La question est donc loin d’être close !

Notons que certains problèmes de mathématiques liés à la mécanique des fluides (que ce soit pour l’océanographie, la météorologie ou pour les problèmes de combustion) sont réputés particulièrement difficiles : en effet, l’existence de solutions régulières uniques pour les équations de Navier-Stokes des fluides incompressibles est l’un des sept problèmes à un million de dollars proposés par la fondation Clay (et selon certains mathématiciens « résoudre ces défis est sans doute l’une des façons les plus difficiles de devenir millionnaire »). Sur ce sujet, une bande dessinée accessible à tous vient de sortir et présente cette « équation du millénaire ».

Pour en savoir plus, un article dans Images des Mathématiques.

laureLaure Saint-Raymond, professeur à l’École Normale Supérieure de Paris, prix Irène Joliot-Curie 2011 de la « jeune scientifique de l’année », prix EMS 2008 des « meilleurs jeunes mathématiciens de moins de 35 ans ». Elle a également contribué à la résolution d’autres problèmes d’analyse asymptotique comme le sixième problème de Hilbert, pour obtenir les équations de la mécanique des fluides à partir de l’équation de Boltzmann comme elle l’explique dans sa présentation dans le cadre du cycle « un texte, un mathématicien » en 2010.

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